Depuis la nuit des temps, les humains entretiennent un lien végétal avec leurs morts. À travers les fleurs, les arbres et les herbes, ils ont cherché à accompagner les défunts, à marquer leur souvenir, à apaiser leur passage, ou à ouvrir une porte entre les mondes.
Dans les traditions populaires d’Europe, certaines plantes sont devenues emblèmes de ce dialogue sacré entre les vivants et les disparus. Je vous propose un voyage botanique à travers les plantes de mémoire, de deuil et de passage.
Le cyprès : gardien des cimetières
Avec sa silhouette élancée vers le ciel, le cyprès est depuis l’Antiquité un symbole funéraire. Dans la Grèce et la Rome anciennes, on plantait des cyprès près des tombes ou à l’entrée des demeures lors d’un décès. On considérait qu’il ne repoussait pas une fois coupé, et qu’il représentait donc l’irréversibilité de la mort.
Aujourd’hui encore, il veille silencieusement dans les cimetières du sud de l’Europe, tel un pont entre terre et ciel. On le disait protecteur des âmes, mais aussi barrière contre les esprits malfaisants.
L’if : l’arbre de l’autre monde
Vénérable et toxique, l’if est l’un des arbres les plus anciennement associés aux rites mortuaires en Europe. Dans les îles britanniques, de nombreux ifs sacrés se dressent encore dans les cimetières ou à l’entrée des églises médiévales. Son feuillage persistant évoque la survie de l’âme au-delà de la mort, et ses baies rouges et noires sont vues comme des symboles de seuil : à la fois nourrissantes pour certains animaux, mais dangereuses pour les humains.
Chez les Celtes, il était l’arbre de la transcendance, associé à l’éternité, et parfois au dieu de la mort. Il représentait le cycle perpétuel de vie, mort, et renaissance.
Le sureau noir : la porte entre les mondes
Dans les campagnes d’Europe centrale et du Nord, l’arbre de sureau noir était considéré comme habité par des esprits. On ne le coupait jamais sans s’excuser ou faire une offrande. On le plantait près des maisons pour protéger les vivants et honorer les morts, car on croyait qu’il pouvait abriter les âmes des ancêtres.
Ses baies sombres, utilisées dans les sirops et teintures, étaient aussi présentes dans certains rituels de protection et de guérison des peines de l’âme.
Suivez-nous sur les réseaux sociaux !
La lavande : apaisement et purification
Traditionnellement utilisée pour parfumer les linceuls ou les vêtements des morts, la lavande est une plante de repos, de paix et de purification. Dans les campagnes françaises, on en glissait parfois dans les cercueils ou on en brûlait pour purifier les lieux après un décès.
Elle accompagne les deuils doux, les départs paisibles, et évoque le repos éternel dans un jardin embaumé.
Le chrysanthème : fleur du souvenir
Bien qu’il n’ait acquis son association à la mort qu’assez récemment (fin XIXe siècle), le chrysanthème est aujourd’hui la fleur emblématique des cimetières en France. Sa floraison tardive, à la Toussaint, et sa capacité à résister au froid en font un symbole de fidélité et de souvenir durable.
Dans d’autres cultures (notamment asiatiques), il est un symbole de vie, de longévité et d’immortalité.
La pomme : fruit du passage
Dans les mythes celtiques, la pomme est le fruit de l’île d’Avalon, lieu de repos des âmes. On la dépose parfois sur les autels de Samhain ou de la Toussaint en offrande aux morts, notamment en Irlande et en Écosse. Coupée en deux à l’horizontale, elle révèle un pentacle, symbole de protection.
On racontait qu’en laisser une à l’orée de la forêt ou sur un seuil pouvait nourrir une âme errante ou un esprit protecteur.
L’armoise : la messagère des morts
Plante des devins et des passeurs, l’armoise (Artemisia vulgaris) est depuis toujours associée aux rituels de protection, de transe et de passage. Brûlée en fumigation, elle est censée ouvrir les portes de l’autre monde, aider à communiquer avec les défunts, et protéger contre les influences invisibles.
En Europe centrale, on la plaçait sous l’oreiller pour rêver des morts ou recevoir leurs messages.
Le romarin : la mémoire
“Souviens-toi de moi”, disait Ophélie en tendant du romarin dans Hamlet de Shakespeare. Depuis l’Antiquité, cette plante est liée à la fidélité du souvenir. On en faisait des couronnes pour les enterrements, et dans certaines régions, les familles en plantaient au seuil des maisons pour ne pas oublier leurs morts.
Brûlé ou infusé, il est encore utilisé dans les rituels de commémoration ou de purification des autels.
Honorer avec les plantes : un geste ancien, un rituel vivant
Les plantes créent un langage doux, sensoriel, accessible, pour honorer ceux et celles qui ne sont plus là.
Elles accompagnent le deuil, portent nos prières, matérialisent notre mémoire. Et peut-être, dans leur silence végétal, elles écoutent aussi.
L’abonnement à 3 euros
Si vous souhaitez soutenir le MysticMag, vous pouvez vous inscrire à l’abonnement à 3 euros/mois (ou 29 euros/an). Cet abonnement permet de soutenir le MysticMag ! Vous aurez accès au serveur de discussion Discord, à une méditation guidée tous les mois et aux codes promos/événements en exclusivité.


0 commentaires