Mystères et nuances de Samhain
Le Nouvel An Celtique ?
On lit souvent que Samhain était considéré comme le Nouvel An chez les Celtes. Mais Ronald Hutton, historien britannique, souligne que les sources historiques ne sont pas claires : il n’existe pas de preuve directe que chez toutes les communautés celtiques Samhain ait été systématiquement le début de l’année. Ce que l’on sait, c’est que c’était un moment de transition, de liminalité, entre la lumière et l’obscurité.
Durée originelle de la célébration
Plusieurs sources affirment que Samhain durait non pas une nuit mais trois jours. la veille, le jour, et la journée suivante. Mais les détails varient : les rituels, les festins changent selon les lieux, selon qu’on soit chez les Irlandais, dans les terres hautes d’Écosse, ou ailleurs.
Les aos sí : au-delà du « voile mince »
Quand on dit qu’« à Samhain, le voile entre les mondes est mince », on résume de manière simplifiée une vision beaucoup plus complexe issue du folklore gaélique.
Les aos sí (aes sídhe) : littéralement « le peuple des tertres », étaient perçus comme les habitants des collines sacrées et des tumulus funéraires (sídhe). Ils ne sont pas de simples « esprits des morts » : ce sont des entités liminales, liées à la fois aux ancêtres, aux forces de la nature et à l’Autre Monde (Otherworld).
Leur rôle est ambivalent :
- Protecteurs : ils pouvaient apporter fertilité, prospérité, inspiration poétique, protection du foyer et du bétail.
- Dangereux : ignorés, offensés ou négligés, ils pouvaient aussi se montrer vindicatifs : maladies, malchance, perte du bétail, accidents.
- Présages : leur apparition ou leurs signes pouvaient être lus comme des messages pour la communauté.
Les aos sí et les morts
Une partie du folklore assimile les aos sí aux ancêtres. En effet, les tumulus (sídhe) étant souvent des sépultures préhistoriques, le peuple des collines était naturellement relié aux morts.
Mais attention : dans les textes médiévaux, les aos sí ne sont pas réduits à de simples « âmes des morts ». Ils forment un peuple parallèle, parfois décrit comme une aristocratie invisible (Tuatha Dé Danann après leur retrait du monde humain).
Ainsi, à Samhain, ce n’est pas seulement les morts qui revenaient visiter leurs familles, mais un ensemble d’entités du monde invisible, parmi lesquelles :
- ancêtres,
- dieux relégués dans l’Autre Monde,
- esprits féeriques ambivalents.
Samhain : une diplomatie avec l’invisible
On pourrait dire que Samhain était le moment où les vivants devaient renégocier leurs alliances avec les forces invisibles.
- Les offrandes assuraient la paix avec les aos sí.
- La reconnaissance des ancêtres entretenait la continuité du lignage.
- Les tabous (ne pas sortir après la tombée de la nuit, ne pas voyager seul, ne pas négliger les rituels) rappelaient la dangerosité de ce seuil.
En ce sens, le fameux « voile mince » ne désigne pas seulement un accès aux morts, mais une porosité accrue entre les vivants et tout l’univers du Sídhe, peuplé d’êtres aussi fascinants qu’inquiétants.
Suivez-nous sur les réseaux sociaux !
Autres traces européennes de la fête de l’intersaison automne-hiver
1. Chez les Romains : les Mundus et les Parentalia
- Les Romains croyaient que certains jours, le mundus (fosse sacrée qui reliait le monde des vivants et celui des morts) s’ouvrait.
- Ces jours (souvent autour d’octobre/novembre) étaient consacrés aux mânes (esprits des morts) et aux offrandes.
- Même si les Parentalia (février) sont plus connus, on a aussi des fêtes des morts à l’automne.
2. Chez les peuples slaves : Dziady
- Fête des ancêtres célébrée plusieurs fois dans l’année, dont une au cœur de l’automne (octobre/novembre).
- On préparait des repas pour les morts, on allumait des feux dans les cimetières, on invitait les esprits à partager la table familiale.
3. Dans le monde germanique et nordique
- Les sagas nordiques mentionnent des célébrations automnales liées aux ancêtres et aux dieux de la mort (Odin, Hel).
- Álfablót : fête privée célébrée par chaque foyer en automne, dédiée aux álfar (elfes/ancêtres). Comme pour Samhain, c’était un rituel intime de lien avec les invisibles.
- Les Disablót, parfois placés en automne, honoraient les Dísir (esprits féminins protecteurs, ancêtres maternels).
4. Dans le folklore européen plus tardif
- En Europe centrale et orientale, la Toussaint chrétienne et la fête des morts (2 novembre) ont clairement repris ces traditions païennes de banquet avec les ancêtres.
- En Espagne, au Portugal, en Italie du Sud, on retrouve des coutumes d’« inviter les morts à table » ou de leur préparer des pains spéciaux (pan dei morti, pão-por-deus).
- En Bretagne et en Cornouailles, le Kalan Gwav (début de l’hiver) marquait aussi cette période comme seuil saisonnier.
Pourquoi fin octobre / début novembre ?
Le choix de cette date n’a rien d’arbitraire :
- C’est le milieu exact entre l’équinoxe d’automne et le solstice d’hiver : une « intersaison » astronomique.
- C’est le moment où la nature bascule : les jours raccourcissent vraiment, le froid s’installe, les champs sont vides, le bétail est rentré.
- Pour les sociétés anciennes, ce n’était pas seulement une transition climatique, mais un moment existentiel : entrer dans la saison des ténèbres, dépendre des réserves, affronter la mort symbolique de la nature.
C’est aussi pourquoi les morts et les esprits deviennent centraux : quand la terre « meurt », on se tourne vers ceux qui sont déjà passés de l’autre côté.
La plateforme Magie Saisonnière
UN ESPACE SACRÉ EN LIGNE
Qu’est-ce que c’est ?
Il s’agit d’une plateforme en ligne où vous retrouvez chaque mois de nouveaux contenus en lien avec le thème de l’année pour s’harmoniser avec le cycle de la lune et des saisons. Selon le palier d’abonnement choisi, vous avez accès à : des cours, des rituels, des méditations, des tirages de cartes et surtout une communauté de pratiquants pour échanger et explorer ensemble.
0 commentaires